DUEL AU SOMMET. L’évènement de ce Tartuffe, c’est d’abord la rencontre, jamais concrétisée jusqu’alors, entre deux montres des planches. Jacques Weber incarne un Orgon vigoureux, tout en colère contenue, face à Pierre Arditi en Tartuffe narquois et pétillant, volontiers concupiscent. Le décor, tout en rondeurs et blancheur, sert aussi bien les personnalités douce d’Orgon et insaisissable de Tartuffe. Ils sont accompagnés par des comédiennes au diapason, Isabelle Gélinas en Elmire dangereusement séduisante et Manon Combes en pétulante Dorine.
Le vétéran Peter Stein, grand metteur allemand, s’inscrit dans les traces de ses illustres prédécesseurs (Louis Jouvet, Antoine Vittez, Ariane Mnouchkine… ) en s’attaquant au monument de Molière. « En apparence, c’est une tragi-comédie, mais je dois dire que j’ai été surpris par certains traits extrêmement violents qu’elle contient. » Sans esbrouffe, il se concentre sur le texte et sa complexité psychologique. On assiste à la chute du patriarche d’une famille bourgeoise, manipulé par un faux dévot qui lui fait perdre bientôt tout discernement. La satire, cruelle et implacable, reste toujours aussi saisissante.